Dessiner les ombres et les placer correctement est un véritable casse-tête pour de nombreux dessinateurs débutants.
Lorsqu’on commence à s’intéresser aux ombres et aux lumières, on tombe souvent sur l’exemple iconique de la sphère.
Il est arrivé que certains de mes élèves me présentent des copies très réalistes de cette fameuse sphère. Même si leur rendu se rapprochait du modèle de référence, ils n’avaient en réalité pas appris à dessiner les ombres et les lumières : ils s’étaient contentés de copier.
Dans cet article, nous allons, nous aussi, dessiner une sphère posée sur une surface plane, avec un rendu d’ombres et de lumières.
Mais cette fois, je vais décomposer chaque étape du processus pour que vous compreniez ce que vous faites, et que vous puissiez ensuite réutiliser cette théorie dans vos propres dessins d’imagination.

Choix du rendu des ombres
Dans cet exercice, comme dans de nombreux autres liés à l’étude « théorique » du dessin classique, j’utilise systématiquement la technique du hachurage.
Dans cette approche, vous utilisez un outil qui produit un tracé sec et précis — comme un stylo, une plume ou un Rotring — et vous modifiez les valeurs (c’est-à-dire l’aspect clair ou sombre d’une surface) en espaçant plus ou moins les traits entre eux. Ces traits sont appelés des hachures, ou trames.
Je privilégie le hachurage lorsque j’enseigne la théorie du dessin pour plusieurs raisons :
- Lisibilité de la méthode
Cette technique permet de décomposer et de comprendre comment les différentes « couches » du dessin sont superposées. Même une fois le rendu terminé, le processus de construction reste lisible. On obtient ainsi à la fois un résultat finalisé et un aperçu clair de la méthode employée. - Éveil de la conscience du volume
Le hachurage évite les automatismes. Comme vous devez penser en permanence au volume de ce que vous dessinez (les courbures des hachures suivent le relief des formes), vous restez constamment attentif. Cette vigilance renforce l’assimilation des principes que vous étudiez. - Préparation à la peinture
Tramer ses dessins, c’est aussi nourrir les gestes qui forgeront votre « touche » picturale. En hachurant, vous commencez déjà à apprendre à peindre. Vous posez les bases de réflexes solides et sensibles.
J’ai moi-même découvert cette méthode dans l’un des cours qui m’ont le plus marqué, à l’école Pivaut de Nantes, sous la direction du professeur Marc Chalmé. C’était l’une des toutes premières leçons que j’ai reçues en entrant en première année.
Construire son dessin
Lorsqu’on étudie la théorie, cela exclut les « styles » graphiques : on se fonde uniquement sur des observations strictement physiques.
Dans ce contexte, il n’existe pas véritablement de « contour » aux objets et aux formes que l’on observe. Ce sont les contrastes de valeurs (dans un dessin en noir et blanc) qui créent les délimitations entre les différents éléments d’une composition.
Il n’est donc pas question d’enfermer une sphère dans un cercle parfaitement tracé à l’encre, comme on pourrait le faire dans une bande dessinée en « ligne claire », par exemple.
Cependant, vous devez tout de même poser les fondations de ce qui deviendra votre sphère, et cela commence par dessiner un cercle.
Nous allons donc utiliser un outil effaçable pour cette première étape — un crayon à papier, par exemple — et votre mission sera de tracer votre structure en appuyant le moins possible sur votre crayon.
L’objectif est, à terme, de pouvoir gommer ces lignes sans qu’aucune trace ne subsiste.
Les éléments de base
Les éléments que vous devez placer dans votre composition sont :
- le support,
- la sphère,
- la source lumineuse,
Il est essentiel de comprendre que si la sphère n’est pas construite en relation avec le support et la source lumineuse, alors ni le support ne ressemblera à un véritable support, ni la sphère à une véritable sphère.
C’est la mise en relation cohérente de tous ces éléments qui permettra d’obtenir un rendu réaliste de la scène.
Gardez cela en tête tout au long des étapes à venir : c’est cette logique qui vous permettra de comprendre facilement la théorie.
1. Le dessin à plat
Démarrons concrètement.
Dans un premier temps, copiez ma scène telle quelle.
(Si vous recommencez l’exercice, modifiez la perspective et le placement des éléments.)
Tracez les formes de ce qui deviendra la sphère (un cercle) et du support (un plan en perspective).

2. La direction de la lumière
Pour placer correctement les ombres, il est essentiel de connaître le positionnement et l’orientation de la source lumineuse.
Vous pouvez dessiner une petite flèche pour indiquer la direction de votre source lumineuse.

Pour vous garantir un placement correct des ombres sur la sphère, tracez dès à présent le « terminator » sur celle-ci.
Le « terminator » l’outil magique.
Sous ce terme énigmatique se cache un principe physique très simple à comprendre.
La surface d’une sphère, ou de toute forme courbe, n’est éclairée par la source lumineuse que tant qu’elle y est directement exposée.Dans le cas d’une sphère, la lumière éclaire la surface jusqu’à la limite d’un grand cercle (ayant le même diamètre que la sphère). Au-delà de cette limite, la surface n’est plus exposée à la source lumineuse.

3. L’ombre portée de la sphère.
Votre source lumineuse peut être un point (dans le cas où elle est proche de l’objet, comme une lampe), ou bien unidirectionnelle si elle est très éloignée de votre sujet, comme le soleil.
Dans le cas d’une source lumineuse ponctuelle, vous pouvez utiliser ce point pour projeter le cercle dessiné par le terminator sur le support en perspective, ce qui dessinera l’ombre portée de la sphère.
Si vous avez une source lumineuse unidirectionnelle, projetez le terminator sur le support en perspective à l’aide de lignes parallèles orientées dans la direction de la lumière.
(Pour rappel, tous les tracés de construction doivent être très légers et pouvoir se gommer facilement.)

4. Les zones très éclairées
En partant du centre du cercle, tracez un axe selon le même angle que celui de votre lumière si elle est unidirectionnelle, ou en direction du point-source si la lumière est ponctuelle. Cela vous permettra de placer le centre d’une ellipse, aux mêmes caractéristiques que votre terminator, qui définira la zone parfaitement éclairée de votre scène.

Ma lumière étant orientée de droite à gauche, le socle sera également très éclairé sur la droite.
Selon la lumière que vous utilisez, le socle peut être entièrement et parfaitement éclairé (en dehors de l’ombre portée de la sphère).
5. Ombrage, premier passage
J’utilise un encrage en hachures classiques. Je fais attention à suivre le volume des éléments, notamment celui de la sphère.
À cette étape, vous pouvez déjà créer de petits dégradés en espaçant vos hachures (comme je l’ai fait) ou en utilisant des points et des tirets.
Il ne doit y avoir aucune hachure dans les zones que j’ai réservées pour la lumière et, à ce stade, je ne croise aucune hachure. Je travaille l’ensemble de l’image de manière homogène.

6. Ajouter des passages
Pour renforcer les ombres, multipliez les passages en couvrant à chaque fois l’intégralité de l’image, en croisant les traits.
Cela vous aide à y voir plus clair dans les zones que vous avez déjà travaillées ou non.
Il faut éviter le « surtravail » et ne pas croiser trop souvent les hachures.
Travaillez les ombres de surface sans toutefois pousser trop loin les valeurs pour le moment.


7. La lumière reflétée
La lumière qui éclaire votre support va rebondir et éclairer les surfaces situées sous le terminator de votre sphère.
Poursuivez avec une étape de hachures pour augmenter la valeur, en vous concentrant sur le terminator, qui sera la zone la plus sombre de votre sphère. Renforcez également l’ombre portée.

8. Ombres d’occlusion
Ajoutez une ombre « d’occlusion », c’est-à-dire une zone où la lumière ne passe pas du tout et qui est donc complètement noire, située dans une petite partie de l’ombre portée à la base de la sphère.

9. Ajoutez un fond
Ajouter un fond avec un dégradé inversé permet d’obtenir des contrastes qui mettent en valeur le sujet.

Gommez vos traits de construction et le tour est joué !
Pour vous exercer, recommencez l’exercice en modifiant la scène (les éléments, la source lumineuse, etc.).
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